LE RÔLE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

 

La constitution de la Vème République introduit une rupture fondamentale dans l'histoire constitutionnelle française avec la création du Conseil constitutionnel. En effet, jusqu'en 1958, prévalait la conception que la souveraineté nationale du peuple et de ses représentants était illimitée et ne pouvait donc être encadrée ; la création du Conseil constitutionnel affirme au contraire que celle-ci doit respecter certains principes fondamentaux et fait ainsi entrer la France dans l'ère de l'" État de droit ", où la démocratie ne se limite plus seulement à des élections libres mais suppose également le respect de certaines règles et principes essentiels : " La création du Conseil constitutionnel manifeste la volonté de subordonner la loi, c'est à dire la décision du Parlement, à la règle supérieure édictée par la Constitution. La Constitution crée ainsi une arme contre la déviation du régime parlementaire ", déclare ainsi Michel Debré le 27 août 1958.

Le rôle du Conseil est triple : il veille au respect de la Constitution, il veille au respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux ainsi qu'à la régularité des élections.

 

Iº Le garant de la Constitution.

1 / Le contrôle de la distribution des pouvoirs.

À l'origine, le Conseil constitutionnel a été voulu par le Général de Gaulle afin de préserver les prérogatives du pouvoir exécutif - auquel la Constitution de la Vème République a assuré une certaine prééminence - contre les risques d'empiétement du pouvoir législatif sur celui-ci : c'est pourquoi il y nomme ses fidèles parmi les fidèles - et notamment son Président, Léon Noël. Et c'est en ce sens que François Mitterrand dénoncera - dans Le coup d'État permanent - la " Cour suprême du musée Grévin, le plus docile des corps dociles du Général de Gaulle ".

Dans cette optique il revient au Conseil constitutionnel de veiller à la distinction entre domaine législatif - qui appartient au Parlement - et domaine réglementaire - qui appartient au pouvoir exécutif (article 41), de façon à préserver le champ d'exercice de ce dernier.

De même, pour éviter de voir le Parlement se ressaisir de ses prérogative, le Conseil constitutionnel intervient préalablement et obligatoirement pour contrôler les lois organiques et les règlement des assemblées (article 61) : ainsi, le Conseil Constitutionnel a été amené en 1959 à censurer le règlement de l'Assemblée nationale au motif que le dit règlement prévoyait des modalités de contrôle du gouvernement non prévues par la Constitution et étendait le pouvoir d'initiative législative des parlementaires alors même que celui-ci avait été limité par la Constitution.

Lorsqu'en 1962, le Général de Gaulle entreprend de vouloir modifier la Constitution en ne la révisant pas selon la procédure prévue par la Constitution (en appliquant directement l'article 11 qui permet de soumettre à référendum tout projet portant " sur l'organisation des pouvoirs publics ", alors que l'article 89 prévoyait expressément que le référendum ne pouvait s'appliquer que sur un projet d'abord approuvé par l'Assemblée nationale et le Sénat), Gaston Monnerville, Président du Sénat, dépose fort logiquement un recours, mais le Conseil constitutionnel, qui aurait dû servir de coupe-circuit mais qui était tout acquis à la cause de De Gaulle, se déclare alors incompétent - bien qu'officieusement il ait reconnu l'inconstitutionnalité du projet.

Mais la réforme de 1974, introduite par Valéry Giscard d'Estaing, qui permet à 60 députés ou 60 sénateurs de saisir le Conseil constitutionnel, a provoqué un renversement : en effet, cela facilite la saisine du Conseil constitutionnel et permet ainsi au pouvoir législatif de contester à son tour les débordements du pouvoir exécutif (ce n'est plus un recours à sens unique)...

De plus, cela a également permis de faire vérifier beaucoup plus fréquemment la conformité aux principes démocratiques et aux droits fondamentaux des lois votées et initiées par le gouvernement - conformément au fonctionnement régulier d'un " État de droit ".

2 / Le contrôle de la constitutionnalité des lois.

Le Conseil constitutionnel contrôle également la hiérarchie des normes - mais n'exerce pas en revanche de contrôle de conventionnalité, sauf en ce qui concerne la partie du droit européen qui constitue une obligation constitutionnelle (article 88) sous réserve qu'il ne soit pas contraire à la constitution - et vérifie donc la conformité de la loi avec la Constitution : " La loi n'exprime la volonté générale que dans le respect de la constitution ".

La réforme de 2008 voulue par Nicolas Sarkozy a introduit une rupture majeure : désormais, le Conseil constitutionnel devient un juge constitutionnel à part entière et acquiert le rôle d'une Cour constitutionnelle dans le sens où il aura également à statuer sur la constitutionnalité des lois qui auraient échappé à son contrôle a priori, puisqu'est introduite une " exception d'inconstitutionnalité " (article 61-1) qui permet à tout citoyen de saisir le Conseil constitutionnel par le biais de la Cour de cassation ou du Conseil d'État, s'il s'estime victime d'une loi inconsitutionnelle qui n'aurait pas pu être contrôlée, soit parce qu'antérieure à 1958, soit parce qu'elle n'aurait pas fait l'objet d'un recours devant le Conseil constitutionnel.

Ce contrôle a d'ailleurs été étendu par la décision du 16 juillet 1971.

 

IIº Le contrôle du respect des principes de la vie démocratique.

1 / Le contrôle du respect des droits fondamentaux.

En effet, dans cette décision - qualifiée par certains de " coup d'état juridique " - le Conseil constitutionnel a lui-même élargi le champs de ses compétences en considérant le préambule de la Constitution de 1946 et la Déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen de 1789 - auxquels fait référence le préambule de la Constitution de la Vème République - comme des principes généraux que les lois doivent respecter (il s'agit de ce que l'on nomme " le bloc de constitutionnalité "). La richesse de ces principes a engendré une inflation de la jurisprudence constitutionnelle visant à garantir les libertés fondamentales de chaque citoyen.

Le préambule de la Constitution de 1946 réaffirme qu'elle reconnaît " les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République " mais ne les précise pas, laissant ainsi un large pouvoir d'appréciation au Conseil constitutionnel pour censurer une loi ou pas...

2 / Le contrôle des élections.

Enfin, les élections au niveau national - élections présidentielles et législatives - sont organisées sous le contrôle du Conseil qui proclame les résultats (tandis que les autres élections relèvent des tribunaux administratifs).

 

C'est ainsi que l'on est passé d'une conception pyramidale dite " républicaine " à un modèle de contre-pouvoirs et d'équilibre des pouvoirs dit " démocratique ".

 


 

TESTEZ VOS CONNAISSANCES SUR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL EN DIX QUESTIONS

(plusieurs réponses possibles)

 

1. Le Conseil constitutionnel a été présidé par :

A) Le Doyen Vedel

B) Léon Noël

C) Georges Pompidou

2. Certaines années, le Conseil constitutionnel a compris :

A) 11 membres

B) 12 membres

C) 13 membres

3. A l'heure actuelle, Valéry Giscard d'Estaing :

A) Pourrait siéger au Conseil constitutionnel

B) Ne pourrait pas siéger au Conseil constitutionnel

C) Devrait présider le Conseil s'il décidait d'y siéger

4. Le président du Conseil constitutionnel est :

A) Nommé par le président de la République, tous les trois ans

B) Nommé par le président de la République parmi les membres qu'il a nommés

C) Nommé par le président de la République de manière discrétionnaire

5. Le Conseil constitutionnel est un juge :

A) Electoral

B) Administratif

C) Constitutionnel

6. Le Conseil constitutionnel donne des avis :

A) En cas de dissolution

B) En cas d'utilisation de l'article 16

C) En cas de déclaration de l'état de siège

7. Le Conseil constitutionnel juge la constitutionnalité :

A) Des traités

B) Des lois

C) Des règlements

8. Le contrôle de constitutionnalité pratiqué par le Conseil constitutionnel est :

A) Un contrôle a posteriori

B) Par voie d'action

C) Par voie d'exception

9. En vue du contrôle de constitutionnalité des lois ordinaires, le Conseil constitutionnel peut être saisi par :

A) Le président de la République

B) 80 députés ou sénateurs

C) Les présidents de conseils régionaux

10. En vue du contrôle de constitutionnalité des lois ordinaires, le Conseil constitutionnel est saisi :

A) Obligatoirement

B) Facultativement

C) Automatiquement

 

Question 1 : réponse B.

Question 2 : réponse A (en 1962, lors du coup de force gaulliste, les deux anciens Présidents de la IVème République, Vincent Auriol et René Coty, décident de siéger, comme les y autorise la Constitution dans son article 56, puisque les anciens Présidents de la République sont à vie membres de droit du Conseil constitutionnel, s'ajoutant ainsi aux neuf membres " habituels " ; de même, depuis 2007, Valéry Giscard d'Estaing et Jacques Chirac siègent régulièrement).

Question 3 : réponse A (à condition d'abandonner tout engagement politique).

Question 4 : réponse C (article 56).

Question 5 : réponses A et C (articles 58 à 61).

Question 6 : réponse B (article 89).

Question 7 : réponses A et B.

Question 8 : réponses B et C (le Conseil constitutionnel ne peut s'auto-saisir : il doit être saisi selon l'article 61 soit par la Président de la République, soit par le Président de l'Assemblée nationale ou du Sénat, soit par soixante députés ou sénateurs ; depuis 2008, tout citoyen peut invoquer " l'exception d'inconsitutionnalité " devant la Cour de cassation ou le Conseil d'État pour un loi antérieure à 1958 ou une loi qui n'aurait jamais été déférée au contrôle du Conseil constitutionnel).

Question 9 : réponse A (article 61).

Question 10 : réponse B (article 61).

 

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